Mieux comprendre les fondements de la pédagogie Montessori

Aujourd’hui, nous avons eu envie de vous parler plus précisément de la pédagogie qu’elle a développée, de ses grands principes, du rôle que peuvent jouer les adultes (enseignants et parents), …

Nous avons à nouveau fait appel à Charlotte Poussin et Martine Gilsoul (« Maria Montessori, une vie au service de l’enfant », DDB, 2020) pour répondre à nos questions. Ces deux éducatrices ont toutes deux dirigé des établissements Montessori et ont écrit de nombreux articles pédagogiques et ouvrages sur ce sujet.

Quels sont les grands principes de la pédagogie Montessori?
Pouvez-vous nous les décrire un peu ?

La pédagogie Montessori repose sur trois piliers principaux qui en génèrent beaucoup d'autres.

Je commence par le plus important : la posture de l'éducateur/de l’adulte qui s'occupe des enfants et de tous les adultes qui accompagnent les enfants à l'école Montessori. Une posture de respect fondamental de l'enfant parce qu'il a confiance dans la capacité d'auto-éducation de l'enfant lorsque celui-ci est placé dans un environnement préparé.

Ceci nous mène à notre second pilier qui est cet environnement préparé comme un cadeau. Quand on prépare un cadeau, on réfléchit à qui on va l'offrir et on réfléchit à ce dont la personne a besoin ou envie. En général, c'est à voir ensemble. C'est un environnement qui est préparé en fonction de l'âge de l'enfant, sachant qu'il a des besoins très différents selon chaque tranche d'âge. Montessori a vraiment théorisé tous les besoins des enfants selon leur tranche d’âge. Donc, les environnements qui reçoivent des 3-6 ans ou 6-12 ans sont différents, ont des particularités différentes. Donc, ce cadeau, il est préparé, soigné, entretenu et offert. Au quotidien, pour l’adulte, il y a vraiment un travail de remise en état de l'environnement à la fin de chaque journée et de préparation à l'environnement au début de chaque journée. Concrètement, par exemple, il y a des tas de petites éponges qui sont nécessaires dans la classe 3-6 ans qu’il va falloir humecter le matin. Il y a des activités qui nécessitent un peu d'eau chaude, un peu d'eau tiède. Nous allons préparer cela afin que l’élan de l’enfant ne soit pas entravé parce qu'il lui manque un objet, parce que l'un des éléments est cassé, abîmé, défectueux ou manquant.

Ce matériel, c'est le troisième pilier. Nous terminons par lui parce que c'est vrai que c'est malheureusement souvent celui qui retient l'attention de tout le monde et beaucoup considèrent donc que la pédagogie Montessori, c'est le matériel. Non, c'est vraiment ce qui arrive en dernier lorsque les deux premiers piliers sont bien là. On peut se reposer sur celui-ci, qui est essentiel, mais il ne se suffit pas à lui seul. Ce matériel est très important, c'est lui qui enseigne à l’enfant dans la mesure où c'est lui qui transmet les savoirs à l'enfant. En réalité, c'est la manipulation de celui-ci qui permet à l'enfant de découvrir les principes de chaque matériel qu’on lui présente, qu’on lui propose d'appréhender. On appelle ça des abstractions matérialisées : chacun de ces matériels présente une activité/difficulté isolée, de manière à ce qu'elle soit facilement palpable, de façon vraiment concrète, préhensile par les sens. Une fois que l'enfant le manipule bien, on lui donne le vocabulaire et on lui permet de réaliser qu'il a appris. En fait, il manipule et apprend de façon inconsciente. Et puis ensuite, on l’aide à prendre conscience du fait qu'il a appris.

Ces trois piliers sont complètement inter-mêlés parce que :

En effet, si le matériel est posé sur une étagère non accessible aux enfants et qu'on ne leur présente pas, il n'y a pas forcément le lien qui se fait. Notons que les autres enfants peuvent aussi donner envie de manipuler le matériel et pas uniquement l’éducateur. Mais c'est tout de même effectivement l'adulte qui joue ce rôle de chef d’orchestre.

On met en place ces trois piliers (environnement, posture de l’adulte et matériel) et on attend de l'enfant qu'il découvre par lui-même. C’est dans la manière dont on lui présente le matériel qu’on lui donne des éléments théoriques et dans la façon dont on conclut l'activité. En effet, chaque activité comporte des étapes. Quand on voit qu'il a bien acquis la première, on peut lui montrer une variante pour lui permettre d'approfondir. On l'accompagne tout de même à chacune de ces étapes. C’est donc dans la relation avec le matériel et avec la verbalisation de l'adulte que l'enfant apprend. Mais cela peut aussi se faire avec un camarade qui est déjà passé par ces étapes auparavant. Et ça nous mène à un point essentiel de cette pédagogie : le mélange des âges. En effet, dans cet environnement préparé et avec ce matériel, il y a une atmosphère de collaboration. Les enfants, qui ont des âges variés, ont le droit de se parler et de se déplacer, de s'asseoir sur une chaise ou un tapis, de se lever, de choisir leur matériel. C’est tout cela qui permet une grande émulation, une stimulation des plus petits par des travaux et une consolidation des connaissances chez les plus grands qui deviennent des passeurs qui transmettent ce qu'ils ont appris. Et on sait maintenant, c'est prouvé par la science, que quand on transmet quelque chose qu'on a appris, on le sait encore mieux qu'avant de l'avoir transmis. C'est donc bénéfique pour tout le monde. De plus, ça permet de développer, chez les enfants, la solidarité, l'envie de partager, d'être ensemble et de former une communauté paisible. C'est très riche. Il y a aussi ce sentiment de confiance que l'enseignant doit avoir envers ces enfants. Il doit faire confiance aux plus grands pour qu'ils puissent transmettre aux plus petits. Ça joue beaucoup aussi.

Ce qui semble également important c’est les grandes compétences/le potentiel énorme que Maria Montessori a découvert chez les enfants et qu’on ne soupçonnait pas qu’ils puissent avoir. On parle par exemple de leur grande capacité de concentration. A l’époque, on pensait que les enfants, surtout petits, étaient incapables de se concentrer. Maria Montessori a découvert qu’ils en étaient capables et qu’en plus de cela, il s’agit d’un besoin pour eux. Elle disait qu’il ne fallait pas déranger un enfant concentré car un enfant concentré est un enfant heureux.

Est-ce pour cette raison que, contrairement à l’enseignement classique, les récréations ne tombent pas forcément à une heure pile ?

Idéalement, dans les écoles Montessori, le matin, il y a une plage de travail d’environ trois heures. Et comme ça, les enfants passent par des phases de plus ou moins grande concentration. En fait, quand on assiste à la sortie d'une école Montessori, on n’observe pas (ou moins) le besoin de l’enfant de se défouler (courir, crier, …) comme on voit dans les écoles normales. En effet, comme ils ont pu se déplacer, qu'ils ont pu vraiment répondre aux besoins intimes qu'ils sentaient en eux, ça se passe différemment. Il y a moins d'agressivité, par exemple. Il y a bien sûr toujours des enfants qui posent problème, ils restent des êtres humains mais ils sont vraiment beaucoup plus respectés dans leurs besoins profonds. En effet, ils ont tout de même été moins frustrés au cours de la journée que dans les écoles classiques, tout en ayant, bien sûr, suivi des règles et des contraintes. En effet, ils forment une société, donc, il y a une grande prise en compte de l'autre (sans doute même plus peut être que dans d'autres contextes). Ici, ils sont tous partie prenante de l'organisation, ils ont des rôles, des responsabilités et ils comprennent pourquoi il faut être calme parce qu’eux-mêmes se rendent compte à quel point c'est gênant d’être dérangés, etc. Ils respectent les règles parce qu'ils sentent qu'ils en ont besoin. Et ça, c'est génial ! C’est une vraie éducation à la citoyenneté.

Tout cela, ça mène aussi à une capacité d'être autonome, à une grande confiance en soi, à une certaine harmonie. Ce n’est pas forcément présent dès les premiers jours de la rentrée, bien sûr, mais ça se met en place en général après un mois et demi. On commence alors à être dans des classes « normalisées », ce qui ne veut pas dire « normales » mais qui signifie que rien n’est dévié, les enfants ne sont pas étriqués, il y a une espèce d’harmonie qui s’est mise en place. Ça prend un mois et demi. Et puis en fait c’est féérique… C'est impressionnant de voir 30 enfants épanouis, très actifs intellectuellement, qui vont d'une activité à une autre, qui savent où tout va, qui remettent tout en place, .... C'est assez fascinant !

Oui surtout qu’un mois et demi, c’est court quand même pour arriver à cela…

Après, bien sûr, il y a des classes où c'est plus lent. Ça dépend de la qualité de l'environnement, de l'expérience de l'éducateur, des enfants eux-mêmes, … Et puis, en générale, il n’y a qu’un tiers des enfants qui sont nouveaux dans la classe donc parfois, ça peut prendre moins de temps aussi. En effet, il y a des classes 3-6 ans où on reste 3 ans et des classes 6-12 ans où on reste 6 ans.

Pouvons-nous reparler du rôle de l’adulte plus précisément ? Quelle est la posture de l’adulte dans cette pédagogie ? Quelles différences avec les pédagogies plus « classiques » ?

Le principe de la pédagogie Montessori, c'est vraiment une éducation indirecte dans le sens où l'adulte, l'enseignant ne va pas agir directement sur l'enfant mais tout va passer à travers la préparation de l'environnement et du matériel. Si, par exemple, on a des enfants qui posent problème, nous allons, par l'observation, essayer de voir quelles sont les activités par lesquelles ils sont les plus intéressés et, grâce à l'intérêt qu’ils portent à ces activités, nous allons les amener à s'immerger vraiment dans leur travail.

Maria Montessori parlait des enfants de manière très douce mais pouvait être dure quand elle parlait des enseignants. Elle parlait de « la nouvelle maitresse » et d’une réelle conversion de la part de l’enseignant. Je pense à cette phrase de Hélène Lubienska: « l'auto-éducation de l'enfant est liée à l'auto-discipline de l'adulte ». En parlant de « nouvelle maîtresse « , Maria Montessori voulait dire qu’il fallait que nous nous éduquions nous mêmes pour pouvoir éduquer les enfants. Ca veut dire parler moins, être très humble, parce que ce n'est pas nous qui donnons l'intelligence aux enfants. Nous devons être là « simplement » pour soutenir leur développement. On observe l'enfant et on intervient seulement quand il nous le demande. Si on voit qu'il est en difficulté, on ne va pas tout de suite agir parce que c'est bien qu'il se pose des questions, qu'il essaye de comprendre, qu'il aille jusqu'au bout de son raisonnement. Et puis s’il lève la tête et qu’on le sent vraiment en difficulté, on peut intervenir. Notons qu’il y a quand même tout un rôle de présentation mais nous y reviendrons quand nous parlerons de la « leçon en 3 temps ».

L’objectif est donc aussi de travailler la persévérance de l’enfant ?

Oui et donc le sens de l'effort. Et ils savent qu’ils peuvent se tromper. Il n'y a pas cette dramatisation de l'erreur parce que l'erreur fait partie de l’apprentissage. Et une chose très importante, c'est que le matériel est auto-correctif. Donc, l'enfant, en travaillant avec les activités Montessori, va se rendre compte lui-même qu'il s'est trompé. De ce fait, ça change vraiment la relation qu'on peut avoir avec les enfants parce qu'on n’a pas ce rôle de « pointer l’erreur ». Ca dédramatise vraiment l'apprentissage.

Et il y a un article intéressant, mais qui n'est pas traduit en français, « La responsabilité de la nouvelle maîtresse » (1931) où Maria Montessori explique qu’on ne pourra résoudre totalement le problème de l'éducation qu'en travaillant avec la maîtresse, parce que c'est elle qui est responsable du problème de l'éducation. Ce sont les personnes qui sont les plus proches de l'enfant qui font le plus de dégâts quand ils ne sont pas bien formés. Il faudrait pouvoir lui éclairer la conscience, la dépouiller de ses préjugés, qu'elle devienne humble et passive. Ça a l'air facile mais en fait, ça ne l’est pas du tout, surtout quand on était d'abord institutrice traditionnelle. On était habitué à être un peu au centre, à décider. Donc ça demande vraiment une conversion et un changement d’attitude. Ce n'est pas facile d'être une maîtresse Montessori mais c’est une vraie école de vie. Il faut faire un vrai travail sur soi et sur le matériel. Il faut qu’il soit toujours au service de l'enfant. Au centre, il y a toujours l'enfant qui a un potentiel énorme et qu'on doit servir. Hélène Lubienska explique que les adultes sont un peu comme ceux qui préparent les couleurs pour l’artiste. Ici, l'artiste, c'est l’enfant. L’enseignant va s'adapter et guider. L'enfant choisit la destination. Le guide accompagne en adaptant le parcours (en fonction de ses capacités et de ses acquis) mais c'est l'enfant qui fait tous les efforts.

Pour revenir sur cette notion d’erreur, annoncez-vous d’emblée que l’enfant peut en faire,
que ce n’est pas grave ?

On n'appelle même pas ça « erreur ». Dans la mesure où il n'y a pas de notation, où on ne pointe pas l'erreur, la fin de l'exercice est vraiment vue comme une étape. « Ah non, c'est pas ça, continue. » L’erreur est plus un signal pour l'enseignant. Elle montre que l'enfant n'a pas compris et qu'il faut peut-être lui présenter un autre matériel. Et même si un enfant fait une erreur, on ne réagit jamais à chaud. L’erreur permet de voir l'engagement de l'enfant, sa concentration, son intérêt, ... Et c'est ça qui est important. Mais c'est vrai qu'il n'y a pas cette anxiété de l'erreur. Mais cela arrive que certains enfants aient spontanément un niveau d’auto-exigence important, déchirent un dessin parce qu’il n’est pas assez bien, … Donc il nous arrive d’être amenées quand même à les rassurer et dédramatiser et leur proposer des astuces pour détourner, s’adapter, … Exemple : transformer un gribouillis en papillon, gommer, écrire au crayon plutôt qu’au stylo/bic, coller un papier par-dessus, … On amène l’enfant à trouver des moyens, des solutions.

La leçon en 3 temps intéresse particulièrement Learning Brain.
Pouvez-vous nous en dire davantage ?

Maria Montessori a énoncé un grand principe, c'est que la maîtresse doit compter ses paroles, c’est-à-dire qu’elle ne doit pas trop parler parce qu'en fait, c'est l'enfant qui apprend. Nous, on a souvent tendance à parler, parler… et l'enfant est noyé dans des flots de paroles. Du coup, il n'écoute plus. Pour Maria Montessori, les leçons doivent être objectives. Et donc, l’enfant apprend par son expérience et par ses sens, surtout lors de l’éducation sensorielle, qui est très importante jusqu'à 6 ans.

La leçon en trois temps, elle, intervient après que l'enfant ait pris connaissance de l’activité. C'est ce qu'on appelle l’initiation. Le rôle de l'enseignant est alors de mettre l'enfant en contact avec cette activité que l’enfant va pouvoir manipuler. La leçon en trois temps intervient après quand on veut donner le langage/lexique/nomenclature correct. Les leçons doivent être simples et objectives. Maria Montessori s’est inspirée d’Edouard Seguin pour développer cette « leçon en trois temps ».

Par exemple, pour les petits, on va travailler les notions de « petit » et « grand » en trois temps, en utilisant la « tour rose » (matériel Montessori):

Et puis, si l'enfant se trompe ici, ça peut vouloir dire qu’il n'est pas intéressé ou qu’il est fatigué. Et donc, on peut reprendre un autre jour. Mais on ne va pas dire « zut, tu n'as pas bien compris. Je vais reprendre un autre jour ». On arrête là.

C’est vraiment le strict nécessaire mais c’est très intéressant de procéder comme ça. Maria Montessori, dans le livre « pédagogie scientifique », donne des exemples intéressants. Expliquer le concept « petit » est très difficile, on ne peut expliquer ce terme que par rapport au concept « grand ». On risque alors de partir dans des explications hyper longues et peu efficaces. L’idée avec la méthode explicitée plus haut est de faire le strict nécessaire et c’est l’enfant qui fait tout le travail. Nous l’introduisons au concept mais c’est lui qui fait le lien entre son expérience sensorielle et le nom. Et donc on travaille aussi un peu la mémoire.

Et en termes de vitesse d’apprentissage ?

Par exemple, à la première étape, pour certains enfant, on peut ne dire qu’une ou deux fois « petit » alors que d’autres vont avoir besoin de plus de temps. Ici, c'est un exemple très simple, mais on peut le faire pour les noms de couleurs, pour des concepts plus importants.

Et à la fin du troisième temps, on considère que la leçon est acquise et qu’on peut passer à quelque chose de nouveau ?

Oui. Après si on fait ça avec les lettres, par exemple, on peut lui dire « est-ce que tu veux qu’on ajoute une nouvelle lettre ? ». S’il dit non, on accepte son « non ». Ça veut dire qu'il en a assez et on passe à autre chose. Et ça c’est un petit défi. Il faut respecter vraiment l'enfant, même si on pense qu’il pourrait faire un petit effort. Voilà, ça ne sert à rien de le forcer. Et le jour d’après, il en apprendra peut être 10. Donc, cette confiance, ce n’est pas simple car on a toujours tendance à croire qu’on sait mieux que l’enfant pour lui.

Pouvez-vous nous expliquer l’esprit absorbant et le lien avec les capacités attentionnelles ?

Pour répondre à cette question, Charlotte Poussin nous propose un extrait de "3 minutes pour comprendre 50 principes clés de la pédagogie Montessori » de Ch. Poussin ( Le Courrier du livre – 2019)

« Esprit absorbant : L’esprit absorbant est un état d’esprit qui permet à l’enfant, de la naissance à 6 ans, d’apprendre rapidement et sans effort, à travers tout ce qu’il vit dans son environnement. L’esprit absorbant permet à l’enfant de se construire mentalement, en synergie avec son environnement, qu’il le veuille ou non. Cela lui permet d’intégrer les habitudes, la mentalité, la culture et les valeurs de la société dans laquelle il grandit. Autrement dit, cet état d’esprit lui permet de s’adapter à son milieu et de sentir qu’il en fait partie. Cet état d’esprit est inconscient jusqu’à 3 ans puis devient progressivement conscient.

Esprit comprenant : L’esprit comprenant que l’enfant développe, à partir d’environ
6 ans, lui permet de raisonner en ayant de plus en plus recours à l’abstraction et à l’imagination. Il acquiert grâce à cela une capacité à réfléchir, à manier des images mentales et des concepts, à gérer ses émotions, à distinguer le juste de l’injuste et le moral de l’immoral. Cet esprit comprenant, aussi appelé « esprit raisonnant », lui permet d’étendre sa quête d’indépendance au domaine intellectuel. »

Pour revenir aux périodes sensibles, ce sont toutes ces caractéristiques de l’esprit absorbant que Maria Montessori place entre 0-6 ans. Ce sont les grandes tendances que l’enfant a.
Il y a plusieurs périodes sensibles :

Quand on parle d’esprit absorbant, on prend souvent l’exemple d’une éponge. Or, ce n’est pas un bon exemple car l’éponge est limitée, elle ne peut pas absorber un maximum, lorsqu’elle est trop remplie, elle relâche l’eau. L’esprit absorbant de l’enfant n’est pas comme ça. Maria Montessori fait plutôt le lien avec une photo. Sur une photo, qu’il y ait 50 ou 150 objets dessus, ça ne change rien. L’esprit absorbant de l’enfant va tout absorber, qu’il y ait beaucoup ou pas beaucoup. C’est pourquoi nous avons une grande responsabilité dans la préparation d’un milieu riche et adéquat.

Et les parents, ont-ils un rôle à jouer?

Oui, bien sûr. Maria Montessori s'est même adressée à eux et leur a écrit plusieurs livres. Le rôle des parents est essentiel, il faut qu'il y ait une collaboration et un même état d’esprit, le plus d’harmonie possible entre la démarche de l'école et la démarche de la famille dans le respect de l'initiative de l'enfant, le fait de ne pas tout lui interdire ni tout lui autoriser, de mettre à sa disposition tout ce qu'il a le droit de toucher. On peut lui montrer à la maison comment couper une carotte, comment ratisser les feuilles d'un jardin, etc.

C'est un état d'esprit. Cette démarche peut être initiée partout. Le fait de ne pas gronder un enfant quand il fait tomber un objet et qu’il se casse, ça peut aussi bien se faire à la maison qu'à l'école. Il y a vraiment un rôle très important des parents bien sûr. S’il y a toute cette atmosphère bienveillante qui est mise en place à l'école et qu'à la maison, l’enfant est brimé ou téléguidé ou qu’on lui interdit tout ou qu’il passe ses journées devant des écrans, rien ne va plus … Bref, le rôle des parents est essentiel. Ce sont les éducateurs premiers des enfants. A l'adolescence, Maria Montessori estimait quand même que les parents devaient se retirer un petit peu pour un meilleur épanouissement de l'adolescent. Mais c'est peut-être aussi très lié à une époque. Je ne sais pas si elle dirait la même chose aujourd'hui. Maria Montessori proposait une séparation précoce (11-12 ans) avec l’idée d’intégrer un internat. La proposition Montessorienne du collège, c'est un internat.

Mais et si les enfants ne sont pas partants ? Y a-t-il une demande de l'enfant? Après, ça peut se retrouver dans des temps plus limités, comme le scoutisme ou des mouvements de jeunes. Je pense que c'est très important d’avoir des moments sans les parents. Qu’ils puissent avoir des moments d’autonomie, qu’ils puissent monter des projets, des aventures, etc. Sans pour autant que ce soit toutes les semaines, du lundi au vendredi. Ce n’est peut-être plus autant dans l'ère du temps que ça ne l'était à l'époque.

Nous espérons que cet article vous aura permis de mieux comprendre les grandes lignes de la pédagogie Montessori et nous remercions encore mille fois Charlotte Poussin et Martine Gilsoul pour le temps qu’elles nous ont accordé.

Marie Baccus, Camille Geuse et Laura Bertleff, pour Learning Brain

SOURCES:

  • « Maria Montessori, une vie au service de l’enfant » de Charlotte Poussin et Martine Gilsoul , DDB, 2020
  • « 3 minutes pour comprendre 50 principes clés de la pédagogie Montessori » de Ch. Poussin (Le Courrier du livre – 2019)
  • « Que sais-je ? La Pédagogie Montessori », Puf, 2017 – Charlotte Poussin
  • https://montessoricharlottepoussin.com/