Trouble Déficitaire de l’Attention avec/sans Hyperactivité (TDAH)
« Qu’est-ce que c’est exactement ? »
« Comment gérer un enfant qui en souffre ? »
« Quelles adaptations mettre en place à l’école ? »
« Quel type de suivi lui proposer ? »
En tant que neuropsychologues, nous nous devions d’aborder ce sujet ! Le TDAH n’a plus de secret pour nous et il n’en aura bientôt plus pour vous ! Notre objectif, avec cet article, est d’amener une meilleure compréhension de ce trouble mais, surtout, d’apporter des pistes concrètes dans la prise en charge des enfants qui en souffrent.
Le TDAH, c’est quoi ?
Vous êtes certainement nombreux à avoir déjà lu des tas de choses à son propos mais laissez-moi quand même en faire une petite description pour ceux qui n’en ont pas eu l’occasion.
Les symptômes
Il existe trois types de TDAH :
- Inattention prédominante
- Hyperactivité et impulsivité prédominantes
- Forme mixte (inattention et impulsivité/hyperactivité)
#1 Déficit attentionnel :
- Difficulté à maintenir son attention sur une période plus ou moins longue (attention soutenue).Il s’agit non seulement de la tendance à éviter des tâches qui demandent un effort soutenu mais, en plus, de la difficulté à terminer une tâche ou à être efficace jusqu’au bout (plus d’erreurs et moins rapide sur la fin).
- Difficulté à fixer son attention sur une cible précise (sans se laisser distraire) et à choisir l’information pertinente (attention sélective)
- Procrastination
- Difficultés d’organisation
- Mauvaise mémoire de travail entrainant des oublis fréquents et, par exemple, une difficulté à retenir des consignes multiples
- Erreurs d’inattention, pertes d’objets, …
- ...
#2 Impulsivité :
- Difficulté à inhiber une réponse verbale : je donne la réponse tout haut alors qu’on ne m’a pas interrogé, j’interromps les conversations, …
- Difficultés à inhiber des réponses motrices : je fais de grands gestes, je renverse des objets, …
Difficultés à inhiber des réponses émotionnelles : mauvaise gestion des émotions, « explosivité » ou « labilité » émotionnelle, …
- Difficultés à inhiber ses propres pensées distractrices
- Difficultés à attendre son tour ou aversion à n’importe quel délai
- ...
#3 Hyperactivité :
- Agitation importante et permanente
- Besoin de bouger, se lever en classe, …
- Court, grimpe, saute, … dans des situations où ce n’est pas approprié (notez que chez les adultes, ça se manifeste plutôt par de l’impatience motrice)
- Difficulté à rester calme, même quand la situation le demande
- ...
Tous ces symptômes peuvent avoir des conséquences sur les apprentissages, la confiance en soi, les relations sociales, …
Notez qu’il ne faut pas présenter TOUS ces symptômes pour être diagnostiqué TDAH. De plus, il faut qu’ils soient présents depuis longtemps ET qu’ils se manifestent dans plusieurs contextes (école, maison, activités sportives, …).
Pour finir, il me semble essentiel de préciser que, comme dans la population générale, il existe des différences interindividuelles qui peuvent parfois être importantes. En gros : Un enfant n’est pas un autre et c’est le cas avec ou sans TDAH.
Définition
Le Trouble Déficitaire de l’Attention est un trouble neuro-développemental, c’est-à-dire qu’il concerne le développement du cerveau. Une personne atteinte de TDAH voit donc son cerveau fonctionner différemment.
Sa fréquence est estimée à environ 5% des enfants en âge scolaire, soit un enfant par classe. Vous pourrez parfois lire des taux plus élevés mais je pense que ce trouble est souvent « l’étiquette de secours » attribuée aux enfants qui sortent un peu des rangs en termes d’agitation, de comportement, d’inattention et ce, sans qu’il s’agisse forcément du bon diagnostic. En effet, certains enfants présentent des symptômes de TDAH mais les difficultés qu’ils rencontrent sont en fait la conséquence de facteurs environnementaux, familiaux, sociaux, … Dans ce cas, avec une prise en charge adéquate de ces facteurs, les symptômes peuvent disparaitre.
Le TDAH a une grande part de génétique. En effet, un enfant a plus de chance qu’un autre d’en souffrir si l’un de ses parents en est lui-même atteint. Mais il peut parfois être la conséquence d’atteintes neurologiques dues à des complications pendant la grossesse, par exemple, ou un traumatisme crânien.
J’attire votre attention sur le fait que le TDAH n’est pas synonyme ou lié à un retard intellectuel. Au contraire même, puisqu’il l’intelligence « dans la norme » est un des critères diagnostic de ce dernier !
Précisons, pour terminer, que 60 à 80% des enfants présentant ce trouble continuent d’en souffrir à l’adolescence et l’âge adulte. Pour le pourcentage restant, il n’y aurait plus d’impact sur leur fonctionnement. Il s’agit donc surtout de trouver les moyens de vivre avec, sans qu’il soit trop handicapant.
Prise en charge du TDAH
Votre enfant/élève présente des symptômes tels que ceux cités plus haut ? Vous ne savez pas comment réagir ou vers qui vous tourner ? Vous ne savez pas que mettre en place au sein de votre classe ou à la maison ? Dans la suite de cet article, c’est à ces questions que je vais tenter de répondre !
Quelles démarches entreprendre ? A qui s’adresser ?
Quand vous repérez chez votre enfant/élève des signes de TDAH et/ou que vous avez des inquiétudes quant à ses apprentissages, voici les différentes étapes de la démarche à suivre, selon Learning Brain :
Le bilan
Adressez-vous d’abord à un professionnel pour réaliser un bilan complet. Dans ce cadre, c’est vers le neuropsychologue que vous devez vous tourner.
Celui-ci procèdera d’abord à une anamnèse complète. Il s’agit d’une discussion pendant laquelle le neuropsychologue vous amènera à retracer l’historique de la plainte, c’est-à-dire qu’il vous posera des questions sur le fonctionnement de votre enfant au niveau cognitif, émotionnel, relationnel, de ses apprentissages, de son comportement, …
Ensuite, il réalisera un bilan complet qui consiste en :
- Un bilan intellectuel (QI)
En effet, l’intelligence « normale » étant un des critères lorsqu’on souhaite poser un diagnostic de TDAH, il s’agit d’une étape essentielle. De plus, il permet d’aider au diagnostic différentiel, en fonction des cas. Un tel bilan évaluera les capacités de Raisonnement Verbal, de Raisonnement Abstrait, les capacités Visuo-Spatiales, la Mémoire de Travail, la Vitesse de Traitement de l’information, …
Si vous souhaitez en savoir d’avantage sur la notion d’intelligence et sur le bilan intellectuel, soyez patients, Learning Brain a bien l’intention d’aborder cette thématique dans un prochain article !
- Un bilan neuropsychologique
Le neuropsychologue évaluera alors les compétences cognitives de l’enfant à savoir les capacités attentionnelles, mnésiques, exécutives et praxiques.
- Des questionnaires
Certains questionnaires comme le CONNERS et la BRIEF sont bien utiles dans le cadre du diagnostic de TDAH. De plus, ces questionnaires peuvent être administrés tant aux parents qu’aux enseignants et, parfois, aux enfants eux-mêmes.
Au terme de ce bilan complet, le neuropsychologue vous donnera une hypothèse quant au diagnostic. Notez en effet qu’un enfant présentant des symptômes tels que cités plus haut ne sera pas forcément diagnostiqué TDAH. Le neuropsychologue se doit de prendre en compte tous les aspects de la vie de l’enfant (sa famille, ses relations, ses émotions, …) pour interpréter les résultats obtenus. Il sera d’ailleurs parfois nécessaire, en fonction de la situation, de compléter le bilan neuropsychologique par d’autres évaluations : en psychologie, en psychomotricité, en logopédie, …
Le médecin spécialiste
Seuls les médecins, comme le neuropédiatre ou le pédopsychiatre, sont autorisés à poser un diagnostic de Trouble de l’Attention. Beaucoup de familles se dirigent d’ailleurs vers eux en premier lieu, ce qui n’est pas une mauvaise chose en soi. Cela dit, ce médecin vous orientera très certainement vers un neuropsychologue pour réaliser un bilan avant de se prononcer donc, autant le rencontrer en ayant déjà pris les devants. Pas bête, la bête !
Le médecin pourrait proposer des examens complémentaires pour pouvoir poser son diagnostic.
Une fois le diagnostic posé, quelle(s) prise(s) en charge possible(s) ?
Le suivi neuropsychologique
L’objectif du neuropsychologue sera alors d’aider l’enfant à développer ses fonctions cognitives les plus fragiles. Chez un enfant TDAH, le neuropsychologue pourra avoir un impact sur l’attention/concentration, le contrôle de l’agitation et du comportement, l’impulsivité, l’autorégulation liée aux fonctions exécutives ou aux émotions, la méthode de travail et, par conséquent, sur la confiance en soi et l’autonomie.
Un tel suivi se déroule, de manière générale, à une fréquence d’une séance (45min-1h00) par semaine. La durée du suivi dépendra de l’enfant et de sa famille (motivation, implication, maturité, …).
Les aménagements scolaires
Comme pour un enfant myope à qui on propose de porter des lunettes et que l’on place plus près du tableau, il est possible de proposer des adaptations au sein de la classe pour un enfant souffrant de TDAH. L’enseignant joue donc un rôle essentiel dans le suivi de cet enfant et, grâce aux adaptations qu’il mettra en place, participera à sa réussite.
Vous vous demandez en quoi consistent ces adaptations, n’est-ce pas ? Alors, en route la troupe ! Faisons le tour de la question !
Pour les problèmes d’attention – de distractibilité
- Commencez la journée avec les nouvelles leçons ET/OU les tâches qui demandent le plus de concentration (exemple : contrôles).
- Alternez les tâches pour éviter les « chutes » attentionnelles et prévoyez des « relances attentionnelles ». Il s’agit d’un petit geste (que vous pouvez définir avec l’enfant : un signe, une tape sur l’épaule) qui lui permet de se rendre compte qu’il a décroché et qu’il doit se remettre au travail.
- Autorisez de courtes pauses (2-3 minutes maximum) de manière fréquente (à voir en fonction de l’enfant). Pendant ces petites pauses, l’enfant peut simplement poser son crayon et faire le vide dans sa tête. Il pourrait aussi, si son besoin de bouger est important, aller faire un tour de cour, aller faire une photocopie, distribuer des feuilles, … A nouveau, ceci est à définir en fonction de l’enfant car ce qui marche pour un pourrait totalement perturber un autre.
- Ne privez pas l’enfant de récréation ! Il en a impérativement besoin. Quand il s’agit de lui donner une punition, il faut donc trouver autre chose ! Pareil s’il n’a pas fini un exercice, par exemple, ne lui faites pas terminer pendant les récréations.
- Epurez un maximum l’endroit où l’enfant travaille (bureau à la maison, banc à l’école) : n’est sur le banc que le strict nécessaire.
- Mettez l’enfant à l’avant de la classe, près d’un « bon » élève (plus calme) et/ou près du professeur. Dans les classes où les bancs sont placés par îlots ou en U, il est préférable que l’enfant soit le plus possible face au tableau.
- Utilisez des pictogrammes :
- Une grande oreille : que l’on pointe lorsqu’une consigne ou une explication importante va être donnée.
- Un STOP : que l’on pointe pour rappeler qu’il faut réfléchir avant de commencer, qu’il faut prendre le temps d’écouter la consigne jusqu’au bout, …
- … A votre bonne imagination !
- Faites répéter les consignes/explications après les avoir énoncées pour vous assurer qu’elles ont bien été entendues.
- Evitez les feuilles « trop chargées », les dessins distracteurs (qui sont juste là pour décorer). De même, évitez les stimulations visuelles trop nombreuses (classes pas trop chargées en images).
- Evitez les images qui ne sont pas bien nettes quand vous faites des analyses de documents, par exemple.
- Privilégiez une police de taille 12-14 avec un interligne de 1.5.
- Evitez les recto-verso lorsque le verso est en lien avec le recto : cela entraine une perte de repères.
- Evitez les feuilles A3.
- Instaurez des routines : on procède en suivant des étapes claires pour tel ou tel type d’exercice. N’hésitez pas à structurer vos journées et que l’organisation soit la même chaque jour, si possible. De plus, prévenez l’enfant de tout changement d’organisation par rapport au déroulement habituel des journées.
- Veillez à ce que le matériel se trouve toujours au même endroit. Les enfants avec trouble d’apprentissage bénéficient d’un environnement bien organisé, avec un cadre clair et précis.
- Privilégiez les consignes courtes et successives plutôt qu’une longue consigne.
- Laissez plus de temps à l’enfant pour terminer ses exercices ou évaluations OU réduisez le nombre d’exercices. De plus, dans ce cadre, il est important de s’interroger sur l’objectif de l’exercice, sur ce que vous souhaitez évaluer. En effet, si vous proposez une vingtaine d’additions et que l’enfant réussit les 10 premières, c’est qu’il a compris le principe. Si vous sentez qu’il décroche ou s’il commence à faire des erreurs, permettez-lui d’arrêter, par exemple.
- ...
Pour les problèmes d’impulsivité
- Faites répéter la consigne avant qu’il puisse donner sa réponse.
- Obligez l’enfant à relire une consigne 2x avant de commencer l’exercice.
- Apprenez aux enfants à se corriger (se corriger = refaire une deuxième fois l’exercice dans sa tête!).
- Proposez une procédure de travail par étapes. Exemple : face à un problème
Je lis attentivement l’énoncé
Je relis en soulignant en rouge la question et en bleu les éléments utiles pour y répondre
Je me demande comment je vais m’y prendre et je fais un brouillon
Je me demande si la réponse que j’ai trouvée répond bien à la question
J’indique ma réponse au propre
Je lis attentivement l’énoncé
Je relis en soulignant en rouge la question et en bleu les éléments utiles pour y répondre
Je me demande comment je vais m’y prendre et je fais un brouillon
Je me demande si la réponse que j’ai trouvée répond bien à la question
J’indique ma réponse au propre